Sauvons la laïcité (Cannes, 2017)

5 Novembre 2017

Bref CR du colloque de Cannes « Sauvons la laïcité ! » organisé le 28 octobre 2017 par le Cercle Ferdinand Buisson

Participants :

Djemila Benhabib, essayiste, militante laïque,

Faouzia Charfi physicienne tunisienne, ancienne ministre, auteur de l’article sur les sciences en islam que nous avons publié sur le RLR

Yvan Gastaut, historien, professeur à l’Université de Nice, spécialiste de l’Histoire contemporaine,

Catherine Kintzler, Philosophe, spécialiste des Lumières et célèbre avocate de la laïcité

Françoise Laborde, sénatrice PRG, en rupture avec l’Observatoire de la laïcité où elle siégeait et dont elle s’est mise en congé pour incompatibilité avec Bianco

Le tout animé par Renaud Dely, directeur de la rédaction de Marianne

Conférence de Catherine Kintzler : Elle a défini les 2 écueils opposés en apparence qui menacent la laïcité :1) La laïcité dite adjectivée, souple, ouverte, tolérante accommodante, etc… qui conduit directement aux « accommodements raisonnables » que Djemila décrit au Québec, c’est à dire à une acceptation du communautarisme et de la différence des droits, et 2) la laïcité intégriste qui n’est que le faux nez du racisme, particulièrement contre les musulmans (comme « Riposte laïque » par exemple). Elle a montré que, opposés en apparence, ces 2 extrêmes se rejoignent dans la démolition de la laïcité véritable, l’un engendrant l’autre. Elle a rappelé la nécessité de faire de l’école un lieu de neutralité où l’enfant puisse être libéré de ses assignations identitaires. Elle a rappelé aussi la différence entre « espace public » (rue, magasins, transports) où la laïcité n’a pas à intervenir, et « espaces civiques » où se manifeste l’Etat (mairies, écoles, hôpitaux publics) qui doivent conserver la neutralité.
Ensuite Faouzia Charfi a parlé de la Tunisie et des menaces que fait peser l’intégrisme islamiste sur le seul pays musulman encore un peu laïque dans les faits, s’il ne l’est plus dans la loi. Elle croit en la possibilité d’un islam ouvert et tolérant comme celui qu’elle a connu dans sa jeunesse, et rappelle que tout a commencé à se gâter avec l’arrivée de Khomeiny en Iran qui a contaminé les autres pays musulmans.
Djemila Benhabib, a retracé son parcours depuis l’Algérie qu’elle a dû fuir avec ses parents sous la menace du FIS en 1995, et comment elle a vu arriver l’intégrisme à St Denis, cette ville de la banlieue parisienne, connue pour avoir accueilli des réfugiés italiens, puis espagnols, portugais et qui est maintenant quasi invivable… Elle a insisté sur l’aspect politique du voile islamique.
Discussion (comme ils étaient d’accord ce n’est pas vraiment un débat) entre Françoise Laborde et Yvan Gastaut. Elle a rappelé l’affaire de la crèche Baby loup et la bataille juridique dans laquelle elle a joué un rôle et qui a été finalement gagnée après des années de combat, ce qui lui a permis (après bien des obstacles et grâce à la loi travail d’El Khomri (eh oui…) d’introduire un amendement permettant aux entreprises de mettre un article sur la laïcité dans leur règlement intérieur. Y. Gastaut a rappelé la loi de 1905 et a analysé du point de vue de l’historien l’étrange cécité d’une certaine gauche face à l’intégrisme musulman. Il a souligné à quel point, dans les 80’ la « diversité » était considérée comme un enrichissement et combien les choses ont changé aujourd’hui. Certains n’arrivent pas à comprendre que l’ouverture des intellectuels français ait été récompensée par l’islamisme.
Retour sur la scène de tous les participants qui ont répondu à de nombreuses questions de la salle (bien remplie), portant particulièrement sur les difficultés des enseignants (quelques témoignages édifiants). Dans l’ensemble, les gens avaient l’air à la fois déterminés, mais assez démunis quant aux moyens d’agir…

Pas de choses très nouvelles pour nous, mais importantes à dire et répéter et le plaisir de voir une salle nombreuse (mais pas très jeune…)

Nous avons apporté aux organisateurs (Cercle Ferdinand Buisson) le salut du RLR et nous avons mis sur la table des publications une trentaine de Manifestes du RLR qui sont partis (gratuitement hélas) comme des petits pains, on aurait pu en écouler le double.

Voilà. Une très bonne journée (et qu’est-ce qu’il faisait beau à Cannes !!)

Sylviane Roche